Laboratoires d’accélération en économie circulaire, mode d’emploi

Laboratoires d’accélération en économie circulaire, mode d’emploi
Comment circulariser les ressources au Québec? L’Écosystème de laboratoires d’accélération en économie circulaire  du CERIEC fait éclore les multiples réponses et solutions. Cet espace de cocréation et d’expérimentation sur le terrain réunit des personnes représentant tous les maillons de la chaîne de valeur, depuis l’extraction des ressources jusqu’à la fin de cycle des produits.


Depuis sa création, le CERIEC s’est donné pour ambitieuse mission de déployer l’économie circulaire au Québec. D’après un rapport de 2021, l’économie québécoise est circulaire à 3,5%, et moins de 10% des ressources extraites sont remises en circulation une fois utilisées. Québec a toutefois l’intention d’atteindre 5% de circularité d’ici à 2025. Un espace de réflexion collective et d’expérimentation sur le terrain était donc nécessaire pour développer la circularité, en rassemblant les meilleures connaissances disponibles et les parties prenantes.

C’est toute la raison d’être de l’Écosystème de laboratoires d’accélération en économie circulaire (ELEC). «Pour nous, l’économie dans son ensemble doit faire la transition du modèle linéaire vers le circulaire, affirme Chantal Rossignol, coordonnatrice de l’ELEC. Comme ce n’est pas simple, on divise la tarte en morceaux.»  

Pour le moment, deux labs ont été lancés, l’un concernant la construction et l’autre, les systèmes alimentaires. Plusieurs autres verront progressivement le jour, dédiés à des thématiques qui varient en fonction d’un secteur d’activité d’une filière ou bien d’un type de matériau, par exemple. D’une durée de vie de trois ans, chacun d’entre eux est composé de sa propre équipe de gestion, son comité directeur, ses collaborateurs et ses partenaires financiers, bien que Desjardins finance l’ELEC dans son ensemble. Les participants sont issus du privé, du public, de la société civile, mais aussi de la recherche.

 

Imaginer la circularité

La première année d’existence d’un lab est dédiée à la cocréation, un principe fondamental. Au cours d’ateliers de cocréation, les parties prenantes réfléchissent à leurs enjeux et partagent leurs besoins réels pour dessiner une vision globale et systémique de la circularité. À quoi ressemblerait un secteur de la construction ou textile circulaire d'ici à 10 ou 20 ans? Ensuite, vient le temps d’identifier les obstacles. Sont-ils de nature technologique, réglementaire, comportementale, organisationnelle, ou bien tout cela à la fois? Cette étape fait le lit de la suivante: trouver des solutions pour abaisser les barrières.

Par exemple, dans le secteur de la construction, l’un des obstacles à la circularité est l’absence de débouchés pour favoriser la déconstruction, le réemploi et le recyclage. Les équipes du lab dédié à cette thématique ont ainsi eu l’idée de développer des outils pour aider les donneurs d’ouvrage à introduire la circularité en amont des projets de construction. Ces acteur.trice.s de la chaîne pourront connaître leurs options au moment même de la définition des besoins et de la conception. Près d’une vingtaine de projets de ce genre ont été imaginés et on pu être réalisés par différentes équipes multidisciplinaires réunissant des chercheur.euse.s et des acteur.trice.s de terrain.

Le second lab est quant à lui consacré aux systèmes alimentaires, en partenariat avec La Transformerie. Cet organisme lutte contre le gaspillage alimentaire, notamment la problématique des invendus dans les épiceries et les fruiteries. Au Québec, 41% de la nourriture – soit 3,1 millions de tonnes - est rejetée depuis la terre ou la mer à la table. D’autres freins empêchent la durabilité et la circularité des systèmes alimentaires, tels que le manque de littératie sur le sujet et un pouvoir inégalement réparti entre les différents acteur.trice.s.

Laboratoire dit «vivant»

Les labs sont qualifiés de «vivants», car les personnes qui y prennent part expérimentent aussi le changement et infusent leurs nouvelles connaissances dans le quotidien. «L’idée est de sortir la recherche des laboratoires traditionnels pour qu’elle se fasse avec les usagers, dans un contexte réel, ajoute Chantal Rossignol. C’est un apprentissage actif, c’est-à-dire qu’on fait face aux enjeux et on y trouve des solutions.»

Une dimension fondamentale de l’Écosystème implique que les apprentissages soient transversaux, c’est-à-dire qu’ils se transmettent d’un lab à l’autre et que des liens se créent entre différents secteurs et acteur.trice.s. Par ailleurs, chaque lab prend en compte toutes les ressources de toutes les composantes d'une chaîne de valeur. Le Lab systèmes alimentaires, par exemple, ne se concentre pas uniquement sur la nourriture, mais prennent en compte les sols, les équipements et l’eau.

Les résultats des labs qui se traduisent en projets d’expérimentation sont documentés scientifiquement, puis partagés avec toutes les parties prenantes, au Québec et ailleurs. Les résultats et apprentissages des projets du Lab construction seront d'ailleurs livrés en formation sous forme de webinaires gratuits et ouverts à tous et toutes.

«On rencontre différentes personnes au fil de l’année, chacun ayant une compréhension et une perspective propre à sa place dans la chaîne de valeur, souligne Chantal Rossignol. L’intelligence collective augmente au fil de l’expérience.» Le partage des connaissances permet également de s’assurer de briser les silos et d’éviter que les problématiques ne soient simplement déplacées d’une province ou d’un secteur à l’autre.

Beaucoup de gens réalisent qu’il est essentiel de collaborer. Une entreprise peut prendre des initiatives à son échelle, mais il faut que la société dans son ensemble s’y mette pour que l’économie soit circulaire.

Mobiliser l’ensemble de la société

Plus de 300 personnes ont participé au laboratoire dédié à la construction, et près de 200 contribuent déjà à celui sur les systèmes alimentaires, dont les discussions sont toujours en cours. «Les labs sont un succès en termes de mobilisation, confirme Chantal Rossignol. Beaucoup de gens réalisent qu’il est essentiel de collaborer. Une entreprise peut prendre des initiatives à son échelle, mais il faut que la société dans son ensemble s’y mette pour que l’économie soit circulaire.»

Un laboratoire sur les minéraux critiques et stratégiques, spécifiquement dédié à la filière des batteries, est envisagé par l’ELEC. L’eau ainsi que le développement territorial sont deux autres thématiques transversales envisagées. La priorisation de certaines thématiques par rapport à d’autres est basée sur une analyse liée à plusieurs facteurs, dont le potentiel de circularisation, de réduction des impacts sur l’environnement et les ressources, la capacité historique des acteurs québécois à collaborer et à se mobiliser ou encore, la maturité et initiatives actuelles du secteur au Québec.

Les opportunités de financement déterminent également la naissance d’un lab. Le lab dédié à la construction est née d’une volonté de Desjardins, qui souhaitait financer une initiative dans ce secteur. Ensuite, le choix de l’ELEC s’est porté sur les systèmes alimentaires et les textiles – qui verra bientôt le jour, ainsi que les plastiques, cette dernière thématique n’a pas encore été concrétisée, faute d’investissements. 

Alors que l’utilisation mondiale des ressources matérielles doublera entre 2015 et 2050 si la tendance se maintient, la coordinatrice de l’Écosystème croit fermement à l’importance et aux retombées du dispositif sur lequel elle travaille depuis sa création.    

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Auteur de la page

Pascaline David

Modérateur

Emilie Chiasson

Conseillère en communication - Économie circulaire