Miser sur la fonctionnalité | Transformer les rapports de travail

Miser sur la fonctionnalité | Transformer les rapports de travail
Dans l’esprit de Pierre-Marie Legrain, un objectif clair supplante tous les autres, celui de démocratiser la mobilité active. Pour y arriver, le copropriétaire de Dumoulin Bicyclettes, entreprise montréalaise, s’est posé les bonnes questions - et a trouvé des réponses - grâce à l’économie de fonctionnalité et de la coopération (EFC).

Au départ, l'EFC, l’une des douze stratégies de circularité, était un concept inconnu dans l’imaginaire de Pierre-Marie Legrain, copropriétaire du magasin de vélo Dumoulin Bicyclettes depuis 2015. Pourtant, elle faisait inconsciemment partie de sa réflexion. Comment se déplacer intelligemment et économiquement? Comment promouvoir la mobilité active pour mieux respecter l’environnement et favoriser la santé humaine? L’entreprise portait déjà, dans sa mission, des valeurs de durabilité au-delà de la vente de vélo.

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EN SAVOIR PLUS SUR L'EFC 

 

Au fil de diverses rencontres, notamment avec Melissa Stoia de PME MTL et Synergie Montréal, l’intérêt a grandi au même rythme que la découverte de ce modèle d’affaires, axé sur la performance d’usage plutôt que sur la vente du produit en lui-même. Les idées ont muri grâce aux deux années d’accompagnement offert dans le cadre du projet pilote EFC Québec. «C’est assez rare de pouvoir bénéficier d’une telle expertise, de discuter avec des paires, d’échanger sur des problématiques similaires même si l’on provient différents domaines», affirme Pierre-Marie Legrain. 

La coopération entre les divers acteurs fait aussi ressortir la force du local. Car en parlant, on crée des liens, puis des engagements, et in fine, tout ça se monétise.

-Pierre-Marie Legrain

 

De ces discussions a émergé plusieurs projets, dont l’un repose sur la location de vélos cargo. «On souhaite proposer une offre complète, pour qu’il n’y ait plus aucune raison de ne pas faire de vélo, lance Pierre-Marie Legrain. Il y a eu quelques impondérables, notamment des retards de livraison, mais c’est en cours de réalisation.» Mettre en valeur la performance d’usage en proposant des services et la location permettrait de réduire les freins à l’achat et ainsi faciliter l’adoption de ce mode de transport.

La démarche vers l'EFC a permis à l'entrepreneur de mettre en lumière des aspects de leur activité qui n'étaient pas pleinement exploités ou valorisés. «On a mis en place des relations plus solides avec certaines parties prenantes, comme la Ville et ses arrondissements, afin de connaître les raisons pour lesquelles ils faisaient affaire avec nous, indique-t-il. L’idée était d’avoir des retours d’expériences.» Ce changement implique une écoute attentive des besoins et des freins rencontrés, avec une volonté de coconstruction et de collaboration.

 

Métamorphose des liens de travail

«La coopération, c’est la grande révélation, pour moi, s’exclame l’entrepreneur. Elle a joué un rôle majeur dans la métamorphose de ma perception des relations de travail.» Si Dumoulin Bicyclettes continue à vendre des vélos, elle questionne et agit différemment avec ses partenaires, en s’adaptant davantage à leurs besoins. «La coopération entre les divers acteurs fait aussi ressortir la force du local, ajoute-t-il. Car en parlant, on crée des liens, puis des engagements, et in fine, tout ça se monétise.»

Les premiers pas vers l’EFC ont été motivés par le désir de repenser le modèle d'affaires de l’entreprise, tout en promouvant un mode de vie plus sain. «On avait envie de changer notre modèle d’affaire qui consomme des ressources, et nous étions confrontés aux défis de trouver, former et retenir des ressources humaines, c’est très énergivore, dit-il. On s’est demandé comment faire pour pérenniser notre entreprise tout en restant humain.» 

L’approche coopérative a permis à l’équipe de Pierre-Marie Legrain de s’interroger plus profondément sur la raison d'être même de l’entreprise. «À priori, on avait moins de possibilités qu’un manufacturier, analyse-t-il. Il fallait donc qu’on creuse beaucoup plus pour trouver ces relations symbiotiques.»

L'entrepreneur souligne l'engouement croissant pour l'EFC au Québec. Il prédit une forte croissance dans les années à venir, bien que le modèle classique ne soit pas nécessairement destiné à être supplanté. «La transition vers l'EFC est une mutation profonde, estime-t-il. C’est rare d’avoir les capacités de tout changer du jour au lendemain en un an, ce n’est pas dans la réalité financière des entreprises.» Ce modèle a un avenir s'il est abondamment enseigné, expliqué et soutenu, selon lui. «Beaucoup d’entreprises le font sans même s’en rendre compte», précise-t-il. Non pas qu’il soit primordial de porter l’étiquette EFC, mais identifier clairement la démarche permet d’aller beaucoup plus loin. 

 

Conseil aux entreprises
Pierre-Marie Legrain suggère de prendre le temps. «Le virage vers l’EFC est un investissement de temps, c’est une véritable chance de réaliser une introspection, suggère-t-il. De plus, c’est quasiment impossible à faire tout seul, je ne peux pas imaginer avoir acquis le même niveau de connaissance sans le soutien des personnes qui nous ont questionné sur nos modèles d’affaires, nos raisons d’être.» Les idées avaient beau foisonner, depuis plusieurs années, c’est leur concrétisation qui faisait défaut, par manque de temps et de moyens.

«Aller chercher des ressources, c’est la clé, ajoute-t-il. Les entrepreneurs, dirigeants, gestionnaires sont très vite en mode solution, mais c’est important de ralentir, parfois, pour prendre en compte tous les facteurs.» Selon le copropriétaire de Dumoulin Bicylettes, ce modèle ne peut être que bénéfique à la société, dans son entièreté. 

 

La collaboration entre le CERIEC et le CIRIDD au service de l'EFC est soutenue par le ministère des Relations internationales et de la Francophonie du Québec et le ministère de l’Europe et des Affaires étrangères de la République française, dans le cadre de la Commission permanente de coopération franco-québécoise.

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Auteur de la page

Pascaline David

Modérateur

Emilie Chiasson

Conseillère en communication - Économie circulaire